mercredi 18 mars 2020

Le consentement - Vanessa Springora

216 pages
Parution : 2020

Un peu de l’histoire :

Une enfance un peu sombre, avec un père violent ou pour le moins caractériel, que sa femme finit par quitter et qui disparaît du paysage.

Une gamine qui se réfugie dans les livres pour pallier ce père absent et qui fréquente par la force des choses un certain milieu littéraire, côtoyé par sa mère qui travaille dans l'édition.

Un écrivain connu, qui sait se mettre en avant auprès des adultes, pour mieux impressionner les enfants, et qui, à 50 ans jettera son dévolu sur cette jeune fille, comme sur d'autres, forcément impressionnées :
"La présence de cet homme est cosmique".

Et voici comment démarre l'adolescence de Vanessa Springora, 14 ans, "V", qui se laissera entraîner dans les filets de cet écrivain, "G", amoureux manipulateur. Un prédateur.

Elle lui cédera... consentante. 

Mon avis :

J'avais un peu d’appréhension avant de démarrer la lecture de ce livre. Je ne voulais pas me trouver en face d'un pamphlet contre cet écrivain, qu'elle nomme "G" mais dont tout le monde connait le nom véritable (pas vous ?), réalisé à posteriori et par vengeance, quelles qu'en soient les raisons. 
Sans contre argumentation, cela me semblait trop facile.

Or, rien de tel ici. Vanessa Springora évoque les faits, simplement et semble-t-il avec beaucoup de neutralité, de son point de vue de l'époque aussi, celle où elle était une enfant, influençable et innocente. Mais pas seulement. On arrive aussi à "comprendre" le fonctionnement du bourreau, sa maladie sans doute. 
Cela laisse le loisir au lecteur, progressivement, de se faire sa véritable opinion sur cette histoire et sur ce personnage. Et c'est très bien, car c'est aussi un moment où la parole est donnée pour une fois, non pas à l'écrivain, qui a eu tout loisir de s'exprimer durant de longues années, mais à sa victime devenue à son tour écrivaine.

La plume est belle, sans facétie. On parcourt ce livre rapidement, en oscillant entre la sidération, le désespoir et la rage parfois.

Et cette rage n'est pas forcément tournée vers celui qui manipule, qui possède ou qui consomme cette adolescente. Celui-ci, son cas est entendu. C'est un monstre... en tout cas, un hors-la-loi, pourtant couvert jusque-là.
Non, elle est aussi parfois tournée vers ceux qui auraient pu faire quelque chose, mais qui sont restés stoïques. Vers ces lâches, qui, influencés par la notoriété du coupable, par l'époque, n'ont rien fait, ou plus grave encore, ont laissé faire.

C'est vrai que l'époque n'était pas la même ; que ces questions, parfois débattues innocemment sur les plateaux de télévision, étaient moins sensibles et envisagées avec moins de gravité. Comme quoi, ce n'était pas forcément mieux avant...

A l'aune de l'évolution de notre société et des mouvements féministes particulièrement mis en avant ces temps-ci, évidemment, c'est une bombe.

Un livre en tout cas, qui fait réfléchir sur l'influence des adultes envers les enfants, et sur la nécessité de les en protéger, parfois contre leur gré.
★★

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Interview France Culture :




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