mercredi 26 février 2025

King Kong théorie - Virginie Despentes

160 pages
Parution : 2007

Un peu de l'histoire :

King Kong Théorie, c'est un peu comme si King Kong lui-même s'invitait dans le salon de thé de la bienséance féminine et détruisait tout sur son passage. Despentes, avec son franc-parler brutal et son humour caustique, y raconte son expérience de la féminité, des violences subies, du porno et de la prostitution, le tout en dynamitant les stéréotypes. 

Elle commence par une autobiographie expresse, où elle parle de son viol et de ses débuts dans le X, sans jouer la victime éplorée ou la repentie du sexe : elle veut rendre sa dignité à toutes celles qu'on juge "trop vulgaires", "trop violentes", ou tout simplement "trop libres".
En gros, Despentes dit "Non" à la féminité Disney, celle des princesses coincées et "Oui" à une féminité qui sent la sueur, le sang et les larmes.

Elle démonte joyeusement le mythe de la femme fragile qu'il faut protéger à tout prix, celle qui pleure et s'évanouit dès qu'un problème se présente. Ici, pas de victimisation pleurnicheuse, mais une revendication d'un féminisme qui ne s'excuse pas d'être en colère et qui n'a pas peur d'effrayer. 

C'est ainsi un manifeste féministe qui ne prend pas de pincettes et qui dit haute et fort que les femmes, tout comme King Kong, ne seront jamais dociles et soumises à des règles absurdes. Au contraire, elles devraient assumer leur côté sauvage, puissant et parfois incontrôlable, en grognant un bon coup si nécessaire. 

A mon avis : 

Avec un style encore une fois agressif, Despentes n'hésite pas à secouer le lecteur.
Dès les premières pages elle s'impose avec un style direct et percutant qui peut déstabiliser. Elle ne cherche pas à adoucir ses propos pour plaire et c'est ce qui rend sa lecture si intense.
Le ton est parfois coléreux, mais il exprime bien la rage et la détermination d'une femme qui refuse de se taire.

Ce livre n'est pas fait pour ceux qui apprécient les récits nuancés. Cependant, la force de son message et l'audace de sa plume apportent une vision différente.
Elle nous pousse à voir la féminité sous un angle neuf, parfois dérangeant, mais sans jamais trahir son authenticité.

Pour autant, ai-je apprécié ma lecture ?
Non !
Le style est trop brutal. L'accumulation des punchlines et de vérités qui claquent donnent l'impression d'être submergé par une avalanche d'émotions négatives et de révoltes sans répit. 

C'est trop. Peut-être aussi trop personnel. Peut-être qu'on ne peut pas comprendre puisqu'on n'a pas vécu la même histoire, mais pour autant, ce style agressif n'est pas plaisant à lire. 

Dans le cadre d'un article de journal, ça aurait été bien. Mais pour un bouquin, c'est trop. Et en plus c'est chaque fois pareil avec cette autrice (faut faire bien attention à pas dire auteur, hein).
Alors Despentes, pour moi, ce sera assez.

★★☆☆

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Interview V. Despentes chez B. Pivot :





lundi 25 mars 2024

Pardonnez-moi - Maïa Hoti

306 pages
Parution : 2023

Un peu de l'histoire :

Dans la petite commune de Montmartin sur Mer, c'est l'effervescence. Les battues organisées depuis deux jours pour retrouver la petite Roxane, 9 ans, ne donnent rien. 

Au petit matin suivant, Roxane est rejetée par la mer, morte, la tête rasée, violée, torturée.

Dans cette commune où il n'arrive jamais rien, l'adjudante Claire Vasseur et le lieutenant Thibault Guérard, de la brigade criminelle n'ont pas de piste sérieuse.

Lorsque la petite Elodie disparait à son tour, l'enquête s'oriente vers la classe de cours élémentaire dans laquelle les deux fillettes étaient scolarisées.

Vasseur et Guérard s'intéressent à l'amie commune de Roxane et Elodie : Lola, qui semble tenir le choc malgré la disparition de ses deux camarades et malgré le détachement dont fait preuve sa mère, qui la laisse aller seule à l'école alors qu'un prédateur rode.

Après la troisième disparition d'une fillette de la même classe, Lola est certainement de plus en plus en danger.

A mon avis :

Ce roman démarre par un avertissement au lecteur, car il comporte "des scènes susceptibles de heurter sa sensibilité et de réactiver des souffrances émotionnelles". "Pour public averti" donc !

Est-il vraiment si dur ?
Non, pas vraiment. Les situations sont évidemment difficiles et abjectes, mais leur description manque à mon sens de profondeur. Il souffre d'une faiblesse sur les détails, qui permettraient de se faire une idée plus précise des situations et de leur noirceur, même si elles sont déjà glauques.
Cela aurait sans doute l'avantage de plonger le lecteur dans les tréfonds de l'horreur.
Mais il faudra donc rester en surface, même si
 avec de l'imagination on pourrait être "heurté" certes, mais c'est tout. Peut-être suis-je "un public averti" aussi ?

En dehors de cet aspect, qui prend tout de même une bonne part de ce roman, l'intrigue manque un peu d'originalité et de surprises, mais reste intéressante.
Elle est parfois surprenante de simplicité et pose quand même la question de la compétence des enquêteurs, mais néanmoins, certaines situations trouvent une explication plus plausible vers la fin du récit.

Il faut aussi signaler le twist final qui, s'il n'est pas complètement original, reste surprenant.

Au global donc, c'est un livre intéressant à lire et parfois poisseux, mais qui reste en dessous de ce qui est pour moi le roman noir de référence : le Manufacturier de Mattias Köping.
★★☆☆

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Actu.fr : 
Maïa Hoti est une auteur originaire de Cherbourg (Manche). Elle a publié son premier roman en novembre 2023 aux éditions Hello Editions.
Dans Pardonnez-moi, elle évoque le thème de l'emprise psychologique sur mineur grâce à un thriller dans les paysages d'Hauteville et Montmartin-sur-Mer.

"J'étais lycéenne à Sainte-Chantal et j'ai passé tous mes étés jusqu'à ma majorité à Montmartin-sur-Mer. Avec Hauteville, ce sont deux villes que je connais bien. C'est un cadre idyllique aux antipodes de l'histoire sombre qui se déroule au fil des pages", explique la romancière.

dimanche 25 février 2024

La route - Cormac McCarthy

256 pages
Parution : 2008

Un peu de l'histoire :

Sur une route, un père et son fils marchent vers le sud, vers la mer, vers un avenir incertain.

Le décor : un environnement dévasté, postapocalyptique, sans animaux, sans terres cultivables, sans nourriture, si bien que les hommes, pour ceux qui restent, en sont venus à se dévorer entre eux.

"L'homme" et "le petit" trainent avec eux un caddy pour toute richesse, plus ou moins rempli de quelques babioles et du peu de nourriture qu'ils trouvent encore en fouillant les ruines des maisons qui sont toujours debout. 

Les deux sont épuisés, malades. Ils risquent leur vie à chaque instant et n'ont pour seule défense qu'un vieux pistolet avec deux balles dans le barillet.

A mon avis :

On ne saura rien des raisons du cataclysme qui a créé la situation qu'ils vivent. 
On ne saura rien non plus de ce qu'ils cherchent et d'où ils vont (ils ne le savent pas eux-mêmes semble-t-il).

Alors évidemment ce n'est pas là que réside l'intérêt de ce roman apocalyptique. Tout ne doit être que métaphore, sinon on ne voit pas l'intérêt de ce livre.

Alors cherchons la métaphore... Pas évident !

Selon l'auteur lui-même, c'est la difficulté d'être père à 73 ans, qui a inspiré ce roman. Admettons. 
Dans ce cas, les thèmes de la protection impossible à long terme, du passage de témoin dans un monde difficile et dangereux y sont sans doute évoqués, tout comme l'appréhension différente du monde de la part du gamin, qui est encore empli d'espoir, alors que le père n'en a plus.

On aurait pu s'y attarder si seulement il y avait eu un peu d'introspection des personnages, mais le style indirect ne la favorise pas.

Les dialogues non plus... ils sont quasi inexistants et pauvres.

Bref, entre ce qu'on ne sait pas et ce qu'on ne voit pas, voire ce qu'on ne comprend pas, il faut bien reconnaitre que ce livre est assez déroutant.

Il reste un petit quelque chose à tirer de la relation entre ce père et son fils, mais c'est gâché par une écriture rigide, sèche, sans doute voulue pour coller au décor. 

Pas fameux pour un Pulitzer...
★★

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Roman adapté au cinéma en 2009 :



mardi 30 janvier 2024

Pandemia - Franck Thilliez

696 pages
Parution : 2016

Un peu de l'histoire :

Lorsqu'Amandine Guérin est envoyée à la réserve ornithologique du Marquenterre, en Baie de Somme, elle quitte son laboratoire d'analyse bactériologique pour aller à la rencontre de cadavres d'oiseaux, mort de manière surprenante et surtout en nombre suffisamment important pour être suspect.

Les autres cadavres, qui viendront par la suite dans toute l'Europe, laisseront présager d'une pandémie.

Mais c'est au passage du virus à l'être humain que les choses deviennent sérieuses et que celui-ci, qui n’est manifestement pas arrivé là par hasard, risque de faire de véritables dégâts.

Parallèlement à ces évènement, Lucie Hennebel et Franck Sharko, du service Criminelle au 36 quai des Orfèvres travaillent sur une enquête autour d'ossements de quatre SDF retrouvés au fond d'un lac. Cette enquête les mènera dans les égouts de Paris, où d'étranges expériences ont été menées.

A mon avis :

Je suis bien en peine de vous faire un résumé simple et concis après ma lecture de Pandemia. Cette histoire part dans tous les sens, mais tous ont un lien et finissent par se rejoindre.

Il y a une foultitude d'informations et de pistes criminelles qui finiront par aboutir et alimenter le scénario très intéressant de ce livre.

Malgré toutes ces pistes, le lecteur n'est pas perdu. Il suit les deux principales équipes, celle des scientifiques et celle des policiers avec avidité, car pour chacune, des rebondissements sont à prévoir et rendent l'intrigue prenante au plus haut point.

Le danger est partout, il vient de la nature, de la technologie, des hommes... et on est pris au milieu de tout ça.

Pour dénouer le noeud gordien de ces énigmes à tiroir, Sharko, personnage récurrent des romans de Franck Thilliez, et Lucie Hennebel, personnage plus récent mais également récurrent, sont à la manoeuvre.
Nul besoin néanmoins d'avoir lu les autres opus de nos héros pour comprendre et apprécier cette nouvelle aventure. On sent bien qu'ils ont une histoire plus étoffée, mais à part donner envie d'en savoir davantage, ça ne gêne en rien la lecture.

J'ai pris un réel plaisir à suivre cette enquête inquiétante, car la situation qui y est décrite serait tout à fait plausible aujourd'hui. 
Il y a cependant quelques exagérations, mais c'est pour le bien de l'intrigue, qui tient le lecteur jusqu'au bout.

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Interview F. Thilliez - Librairie Mollat