dimanche 13 juin 2021

Ce qui trouble Lola - Françoise Simpère

141 pages
Parution : 2004
Un peu de l'histoire :

"Lola ne cherche pas l'homme de sa vie, ni même un modèle d'homme précis. Elle a trop de curiosité pour ces drôles d'êtres qui composent la moitié de l'humanité pour les résumer en un seul."

"Un jour peut-être... mais avant, elle veut les regarder vivre, les écouter, les toucher, les sentir, les questionner. "

Cette curiosité, elle va la mener jusqu'au bout, sans tabou ni préjugé, en toute liberté.

"Je suis sûre que c'est essentiel pour moi, ce désir d'exploration où chacun peut aller aussi loin qu'il le veut, où l'on ne sait plus si on est femme ou homme, il y a les deux en moi et je veux les connaître."

Et si ses recherches ouvrent des perspectives rares pour la plupart des autres, elles lui permettront de mieux se comprendre elle-même : "j'étais une salope, je suis devenue libre" ; "j'aime que tu réveilles l'homme qui dort en moi, j'aime réveiller la femme en toi, j'aime ta virilité, tu aimes ma féminité, nous sommes doubles et entiers l'un sans l'autre, l'un avec l'autre. C'est peu de dire que tu me troubles"
... jusqu'à lui permettre peut-être de trouver son bonheur.

A mon avis :

Françoise Simpère, explore les possibles avec une certaine curiosité et une grande liberté. Elle ne s'encombre pas des codes relationnels, elle ouvre toutes les portes, sans jugement, et explore les relations déculpabilisées entre hommes et femmes, et entre hommes tout court. 

D'abord curieuse des hommes, elle veut savoir pourquoi "ils mettent tant de fierté dans ces quelques centimètres, et parfois tant de honte".
Elle fait ainsi vivre à son héroïne des rencontres, qui finissent évidemment en relations sexuelles, mais qui permettent également de parler de penchants qui sont traités habituellement comme des tabous.

Elle explore de cette façon jusqu'aux relations homosexuelles (le sexe y est plus égalitaire, mais ils vieillissent souvent seuls - "Ce qui est sordide, c'est parfois la solitude ressentie après l'amour, mais elle n'est pas l'apanage des homos, bien des épouses l'éprouvent"), pour mieux comprendre la nature de ces hommes qu'elle aime bien sûr, dont elle est l'amante parfois, et amoureuse toujours.

C'est en cela, sans doute, que ce livre se distingue d'un simple roman érotique. Certes, il met en scène des relations torrides, mais sans frénésie, toujours avec ce fonds de recherche et de curiosité qui permet au lecteur de dépasser la simple notion d'excitation et d'entrer dans une certaine réflexion quand à la sexualité, la liberté et la recherche du bonheur amoureux.

En matière de liberté amoureuse, François Simpère n'en est d'ailleurs pas à son coup d'essai.
Habituée des récits du genre et adepte du polyamour, elle en explore tous les aspects, en les confrontant à la situation des couples classiques : "la grande escroquerie du couple c'est de ne pas révéler qu'en s'unissant, chacun s'est amputé d'une part de lui-même et n'aura de cesse de la retrouver au prix d'un affrontement quotidien avec l'autre, tout être humain n'a qu'une obsession : se sentir exister, l'ego est mille fois plus puissant que l'amour, ne s'en détachent vraiment que les saints ou Bouddha, mais pour y parvenir, la plupart ont vécu solitaires !".

Un livre enrichissant et qui nécessite une bonne ouverture d'esprit, au delà du simple roman érotique.
★★

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Sur Doctissimo : Interview de Françoise Simpère (pour son livre "Il n'est jamais trop tard pour aimer plusieurs hommes")

Polyamour : "Pourquoi serait-on plus heureux avec un seul partenaire, plutôt que plusieurs ?"
Alain Sousa : Journaliste scientifique
Mis à jour le 20 janvier 2020

Doctissimo : Vous parlez de fidélité plurielle, pouvez-vous nous en dire plus ?

Françoise Simpère : Pour moi, l'amour ce n'est pas posséder, c'est être attentif à l'autre, et désirer son bonheur avant tout. Je ne demande pas l'exclusivité. Il me semble naturel qu'un homme que j'aime soit heureux avec moi - heureusement - mais aussi avec d'autres. Selon moi, le couple se forme autour d'un projet, une famille par exemple, mais il ne peut pas combler tous les désirs et tous les intérêts d'une vie.

Les sociétés occidentales prônent un seul modèle, celui de la monogamie, alors qu'aujourd'hui un couple sur trois divorce ou se sépare. Et je ne parle pas des couples qui restent ensembles et qui s'ennuient l'un avec l'autre. Le moins que l'on puisse dire c'est que le modèle dominant ne convient pas à tout le monde. D'ailleurs, pourquoi serait-on plus heureux avec un seul partenaire dans sa vie, plutôt que plusieurs ? Personne n'est capable de donner une réponse à cette question toute simple.

On nous parle sans cesse de la biodiversité indispensable dans la nature, dans les ressources en énergie, de la capacité à changer de travail, et en amour seulement, on voudrait imposer la monoculture, qui dessèche et appauvrit les sols comme les sentiments ! La "biodiversité amoureuse", c'est quasiment écologique…

Mais pensez-vous que l'on puisse trouver le bonheur dans la monogamie ?

Tout à fait. Il y a des gens faits pour être heureux à deux toute leur vie. Celui qui a eu un coup de foudre pour quelqu'un, et qui a su construire une relation, et la faire évoluer au cours du temps, cela existe et c'est très bien. Mais c'est un modèle rare. Il y a beaucoup plus de divorces, et encore plus de personnes qui sont infidèles, ont des amants ou des maîtresses en cachette. Ceux-ci sont plus attachés aux mensonges et à l'hypocrisie, qu'à la fidélité. La devise "on peut tout faire, du moment que cela ne se sait pas" montre que ce n'est pas l'infidélité qui choque, mais la franchise.

On croit souvent être dans un modèle immuable, transmis par la société, mais il est possible de vivre autrement. D'ailleurs, je rencontre de plus en plus de personnes qui cherchent à concilier la solidité de la famille (là où on a des enfants) et l'envie d'amours plurielles. Attention, je ne dis pas que c'est le nouveau modèle, qui doit remplacer la monogamie ! Je crois qu'en matière de relations amoureuses, c'est à chacun de vivre de manière personnelle sa relation, selon le mode qui lui convient, qui peut d'ailleurs changer au fil des années. L'erreur, c'est de vouloir qu'il n'y ait qu'un seul modèle pour tous !

Vous parlez d'"ami-amant". Pour vous, il n'y a aucune distinction entre amitié et amour ?

Je ne mets pas d'étiquette sur les gens et les sentiments. Qu'est-ce que cela veut dire, amant ? J'ai un ami depuis 25 ans, avec lequel j'ai du avoir cinq relations sexuelles. Est-ce que cela en fait un amant ? J'ai une intimité avec les hommes que j'aime, faite essentiellement d'amitié, un sentiment où l'on aime les gens pour ce qu'ils sont, et de désir lorsque cela arrive. C'est une amitié amoureuse, inconditionnelle, à mon sens l'amour le plus absolu. Cela fait des relations beaucoup plus riches et sans arrière-pensées.

Mais comment cela se passe-t-il au quotidien ?

Mon mari et moi avons toujours eu des relations amoureuses en dehors du couple, certaines depuis de nombreuses années. Lui est plus "couple", même avec ses compagnes. Moi, je suis plus "exploratrice": ce qui m'intéresse, c'est de découvrir des hommes et leur univers, dans des relations différentes avec chacun. Notre mode de vie se traduit surtout par plus de liberté et de respect de l'autre.

Par exemple, je suis partie en vacances 15 jours avec un ami de longue date, avec qui j'ai une relation tendre mais pas sexuelle, puis nous avons rejoint mon mari et les enfants. Cela se concevrait moins facilement dans un couple "classique". Récemment, on a demandé à ma fille ce qu'elle pensait des relations de ses parents. Elle a répondu que notre vie sentimentale nous appartenait, mais qu'en tant que parents, nous avions toujours été présents lorsqu'elle en avait besoin. Elle a ajouté qu'elle ne savait pas du tout quel genre de couple elle vivrait plus tard, que cela dépendrait des hommes qu'elle rencontrerait, et de sa propre évolution. Je l'ai trouvée très mature, elle a tout compris !


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